C’est en ces termes que Jésus, reprenant les mots du prophète Daniel, évoque les actes les plus graves qui soient, ceux qui nous détournent de manière pleine et entière de Dieu. Le séisme qui touche l’Église aujourd’hui est de cette nature. Les révélations du rapport Sauvé nous plongent dans la stupeur et l’écœurement. Il est important de ne pas se voiler la face, en cherchant des dérivatifs (l’Église n’est pas la seule institution touchée, …), en contestant les chiffres, en affirmant que cette réalité est derrière nous. Il faut accepter de regarder la réalité en face : pendant des décennies, notre Église a minimisé ces crimes et les a même souvent couverts. Pour avancer devant une telle situation, je crois qu’il faut se poser la question : que ferait le Christ à notre place ?
Jésus a toujours accepté de se laisser toucher par la souffrance des hommes et plus particulièrement par celle des plus petits. Il a toujours pris leur défense. Rappelez-vous ce que nous entendions dimanche dernier : « Celui qui est un scandale pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer. » (Mc 9, 42). Il me semble important de prendre le temps de pleurer avec ceux qui souffrent, avec ces petits que l’Église a fait souffrir, avec ceux que nous avons fait souffrir. Il y a quatre ans de cela, un chrétien de mon ancienne paroisse a accepté de témoigner de ce martyre qu’il avait vécu enfant, et la communauté a pu mesurer combien de tels agissements l’avait détruit comme enfant et aussi comme homme, et combien il avait été long de se reconstruire. N’oublions jamais que les victimes sont ces « petits » dont nous parle Jésus. Oui, acceptons de pleurer avec ces petits, avec ces victimes, car c’est le Christ qui souffre à travers elles.
Devant Jérusalem qui se détournait du salut qu’il venait lui proposer, Jésus a pleuré. Ce n’étaient pas des larmes de déception, mais des larmes d’amour. Il pleurait sur la souffrance, la misère des habitants de la ville. Mais il a continué à les aimer jusqu’au bout : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23, 34). L’attitude de l’Église sur ces événements a dû faire couler beaucoup de larmes sur les joues du Christ, mais il continue à aimer son Église, et toute la Bible atteste qu’il continue à l’aimer malgré ses infidélités. Rappelez-vous ce qu’il dit à Osée en parlant de son peuple. « Voici que je conduirai ma fiancée au désert et je parlerai à son cœur et je la séduirai à nouveau. » (Os 2, 14). Acceptons en ces temps troubles d’aller au désert avec le Christ pour qu’il nous aide à découvrir ce que c’est qu’aimer en vérité et que l’abomination de la désolation ne règne plus jamais en nos cœurs.
Philippe, curé de la paroisse
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